• Je Regarde Passer le Temps.. (119)

     

    Pour en revenir à la jalousie je lui dois de m'avoir éclairé sur ce qui mijotait en moi. La sauce amère que c'était. Je devenais dingue avec cette histoire de Juliette. La présence de Potiné comme la petite question bête du gros Louis, furent mes révélateurs. Un demi secret retenu dans mon ombre intérieure. J'en étais bel et bien dans cette confusion à tomber amoureux. L'aveu m'étourdissait. Seulement c'était parfaitement ridicule et il n'y avait pas de quoi se vanter. Ma lucidité se chargeant de tout le sale boulot. Mon KO viendrait de l'intérieur sifflait la méchante petite voix. Toujours mon plus terrible ennemi debout sur pattes dans la vieille peau. Aucun effort à fournir, la bête de somme n'avait jamais pu lui refuser quoi que ce soit. Fussent les pires trahisons; Autres ignobles souffrances bien souvent imméritées. Je ne tirais pas la gueule, loin de là. Je semblais aussi à l'aise que n'importe qui. Qu'est-ce que tu deviens toi.?. Vint par exemple s'enquérir Potiné à mon sujet. C'est pépère... Je lui répondis. J'ai mon petit boulot maintenant.. Il fait beau.. La vie est belle.. Et toi?.. Je lui demandais.. On est en plein boum cet été.. J'en suis à rêver que ça se calme un peu.. C'est incroyable non?.. Tu sais.. Il faut pas croire.. J'ai l'air comme ça.. Mais il y a pas que le pognon dans la vie.. Attends!!.. Je rêve là ou quoi.. prend moi autre chose que ton café nom d'une.. Allez.. Tu me fais de la peine.. J'aime pas ça.. Et voilà. A un autre j'aurais poliment refusé. Seulement devant Potiné on ne pouvait que se rendre. A aucun moment dans une conversation avec lui il ne subsistait la plus petite chance de le contrarier, et c'est ainsi que je me retrouvais avec un apéro à la main. Oh.. lâche moi cinq minutes.. Il s'exclama quand Salvador tenta de lui verser je ne sais quoi dans le cou. Cela devait être un bout de glaçon. Ah.. Enfin tu me fais plaisir.. A la tienne.. Il fit en me voyant lever l'apéro. Apparemment content il se retourna et m'oublia aussitôt. Ce qui me permit de reposer l'apéro sur le comptoir sans craindre une nouvelle câlinerie de sa part qui aurait pu me tuer. Oh v'la l'autre.;. Lança Robert en m'apercevant depuis l'entrée. Il y a toujours un autre qui quelque part attend... je répliquais. Propos qu'il sembla soupeser attentivement. T'as raison.. Il conclut en se tenant le menton. Alors mon ami.. Comment ça se passe pour toi.. Tu t'installes.. Je m'enquis assez heureux de cette nouvelle tête qui ne venait pas empiéter sur mes tourments. En dehors de cet endroit;. Il y a pas grand chose dans le coin;. C'est un peu mort... Non?.. Je te le fais pas dire.. Je répondais. Mais te plains pas;.. c'est ce que tu voulais ou je me trompe;.. Nous partîmes ainsi dans des considérations de cette importance. Puis au fil des idées il voulut savoir si j'étais pêcheur et je faillis répondre oui. Pour mon bonheur il continua sa phrase et j'eus le temps de me dire que la pêche pour moi c'était complètement fini. Alors t'es pêcheur ou t'es pas pêcheur.. Il insista. Je voudrais pas te décevoir.. Mais la seule fois où j'ai essayé je devais quinze ou seize ans et ça ne m'a pas donné envie de recommencer.. Ah bon.. Il soupira. Dommage;. C'est bien dommage.. Mais tu fais quoi alors de tes journées.. Il sembla s'inquiéter. Je reniflais tristement. Fixais brièvement le plafond en me disant que l'âme de Raymond ne m'en voudrait pas. Je le voyais se marrer plutôt. N'était-il pas un jeune mort après tout. Et plutôt coquin. Je me souvins confus que je n'étais jamais retourné sur sa tombe après l'enterrement qui ressemblait à une petite réunion entre amis. Monique que je n'avais revu que deux fois malgré mes promesses. Je me jurais de remédier à autant d'indifférence dès le lendemain. Tout le matériel de Raymond pourrissait chez moi dans un coin. Les cannes comme de beaux roseaux secs rongés de poussière. Je me voyais mal les reprendre sur une épaule et m'en aller suivre Robert le long de la rivière. Je n'avais jamais été pêcheur de ma vie. Seulement le copain de Raymond, et comme il pêchait je m'y étais mis avec un enthousiasme qui l'a suivi dans la tombe, mort et enterré avec lui. Robert parle trop à mon goût pour que je parvienne à le supporter dans les mêmes sous bois qui nous menaient à nos jolies coins de pêche. Je ronchonnerais sur ses traces. Il gâcherait tout avec ses façons franches qui ne laissent aucune place au triste repentir de l'âme. Il ne connaît rien aux joies du silence. C'est un brave garçon certes. Mais il y en a trop comme lui sur terre. Puis surtout je commence à me sentir très vieux et fatigué. Plus le goût ni la force de remettre une nouvelle amitié au feu. Je cuis dans mes contradictions et moins j'en dirais meilleures seront mes nuits. Ah.. C'est dommage.. Il parait que c'est plein de truites par ici. Tu veux pas essayer.. C'est sûr;.. Je me tus et il lui parut opportun de découvrir si j'étais marié ou peut-être avec une femme. Non.. Je fis sobrement. Mais alors tu fais quoi dans tes journées?.. Ouih..o'f... je regarde passer le temps.. J'imagine;.. Il s'assombrit avec une pareille réponse qu'il prît pour une énigme. Pourquoi pas.;. Conclut-il peu convaincu et nous restâmes silencieux un moment avant qu'il entreprenne de se mêler à la conversation de la bande à Potiné...

     

     


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