• Pour une fois dans ma vie je tombais sur quelqu'un de sérieux. C'était tout comme elle avait dit. Pas une seconde elle n'avait cherché à me pigeonner. Celle qui m'avait embauché pour jouer dans le film de genre tenait toutes ses promesses, au delà de ce que je pouvais espérer. Nous ne sommes pas tous égaux devant une chose aussi essentielle que le sexe. Mais est-ce vraiment si essentiel. Je n'en suis pas mort de n'avoir pas touché une paire de nichons depuis des années. J'ai l'air tout à fait normal malgré l'abstinence. Mais il est certain que si j'avais vécu dans la peau d'un chanteur à la mode ou d'un play-boy, je ne m'en serais pas plus mal porté. En vérité la seule question qui me tient à cœur dans ce genre de discussion intérieure qui n'en finit jamais, est de peser à sa juste valeur ce qui va réellement compter quand je verrai approcher mon heure à toute vitesse. Vais-je me lamenter de tout ce que je n'ai pas connu, ou au contraire m'extasier devant l'éternité avec ces belles gonzesses Bien Réelles.. , leurs beaux petits culs, la douceur des nichons. Leurs Cuisses.. Voilà bien où on en arrive et à quelles genre de tourments je me suis vu livré dans la solitude. Le cocktail lui est infaillible. Les années qui passent. La déception sans fond comparant l'énorme souffrance que cela coûte du matin au soir et le vide sans nom qui en sort en bout de chaîne. Partant de là toute la vie sociale qui part en couilles. L'irrésistible envie de s'enfuir en courant. Un bout de montagne à escalader et l'ultime refuge enfin. Malgré ça le silence lui-même trop bruyant, lardé d'effrayantes secousses, au début surtout quand la tête résonne inlassablement. Comme un vieux ressort qui ne veut plus s'arrêter. La vraie paix elle se faisant toujours attendre le grand calme néanmoins fera l'affaire. Rachel que je ramonais comme un malade à cet instant ne soupçonnait pas une seconde ces histoires qui me traversaient l'esprit. Ce soir je chasse la connasse... Et le moins qu'on puisse dire est que celle-ci particulièrement y mettait de la bonne volonté. Et pour corser encore l'affaire, je m'inventais la voix sucrée d'Henri Miller pour venir me chanter quelques citations choisies à l'oreille. Ceci au moins n'était pas une nouveauté. Je pratiquais l'exercice depuis pas mal d'années déjà. Dormez en paix mon père, car nous qui sommes éveillés bouillons dans les chaudrons de l'horreur.. Cette dernière m'avait servi un jour où j'avais un peu séché mon travail dans une de mes occupations, Les Pires Dernières Années;.. J'avais pas mal déconné et je m'étais retrouvé sur le grill à souffrir le martyr dans une réunion. J'étais encore marié à l'époque et pire encore c'était une période avec de nombreuses responsabilités, des crédits, des retards en tout genre dans l'existence réelle et odieusement matérielle, les fonds sont bas,.. bref c'était pas la joie. Alors que j'avais le plus grand mal à garder les pieds sur terre. J'ai connu un tas de misères, mais celles-ci particulièrement me faisaient mal, et il fallait tenir. La Vie Étant une Réalité qui Échappe aux Mots d'Auteur... J'avais plus qu'une envie alors.. Dormir;.. Dormir.. Et en effet je dormais beaucoup. Que l'on me croit ou non, à la table de réunion Henri était là en chair et en os, et il me fixait avec une grande compassion dans son sourire. Bien sûr il ne put faire grand chose pour mon problème, mais il n'y comprenait que dalle de toute façon. Puis je ne pense pas que la réalité crue parvenait à réellement l'intéresser. Sans importance. Il me soufflait des mots à l'oreille pour m'amener à prendre ça à la rigolade, des citations tirées de ses bouquins que j'avais lu cinquante fois et dans toutes les langues, et il se payait un tantinet ma tête. Bien oui quoi Il y en a qui ont Jésus ou Bouddha dans leurs pensées. D'autres Trotsky, Freud, que-sais encore, moi je convoque Henri quand ça va mal. Ou tellement bien au point que cela me paraît trop pour un homme seul. Et toujours il répond présent. L'ami le plus fidèle que j'ai eu la chance de connaître..


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  • Le bord de la rivière, et en lisière de forêt. Les routes qui montent vers les sommets. Les grandes plaines vides, et le chant du vent qui souffle sans excès. Les clairières, les ruisseaux qui se cachent dans leur écrin de mousse. Les larges pierres grises qui divisent la rivière en petits cours rapides. Le silence surtout, mais j'appelle toujours silence l'absence d'activité humaine, les cris de malades, leurs moteurs et leurs radios qui rendent fou, et leur besoin incompréhensible pour moi de s'entasser les uns Contre les autres. De ne jamais pouvoir se taire ne serait-ce que cinq minutes. Mais il y a aussi des pierres, celles-qui racontent des histoires, sur lesquelles on pourrait presque lire tout ce qui s'est passé en leur présence Qui sait, si un jour on ne saura trouver dans l'atome de la matière, et toutes les combinaisons atomiques, le moyen de visionner l'intégralité des choses passées, l'histoire vraie. Comme toujours cela surprendra énormément dans les premiers temps, et puis très vite on s'habituera. Tant de choses bien plus étranges sont devenues familières. Mais il y a les villes aussi. Certaines ressemblent à des rêves, et je suis certain que les songes m'en ont montré quelques unes que plus tard je rencontrais dans la réalité. Il y a des villes dans lesquelles on comprend aussitôt que s'y déroulent des aventures intéressantes, et on aimerait en être. Mais on ne peut vivre partout, avec seulement une peau et un temps aussi linéaire à vivre et tellement oppressant que la majeure partie de l'énergie, le fluide vital, passe à lutter contre la folie et la dépression. Le bord de mer parfois, avec de grandes mouettes et des cormorans qui poussent des cris, et la sourde pétarade d'un chalutier au loin ne m'indispose pas. Si je rencontre un pêcheur et que sa voix reste en harmonie, juste pour dire des banalités et qui ne couvre pas les sons de la nature. Alors je m'en satisfais. Mais des champs encore et des montagnes qui s'élèvent dans le silence. Une fumée au loin au dessus d'un feu qui sert à brûler des herbes et les branches mortes. Et je retourne sur le lit de la rivière au milieu de la plaine, où je cherche du regard les gros poisson qui passent entre les pierres, avec les montagnes au loin sur lesquelles il reste encore de la neige tombée durant l'hiver. J'écris pour ça. Sans explication aucune, ayant renoncé pour toujours à vouloir comprendre. Je ne sais pourquoi ma présence dans le lit de la rivière et l'approche de la lisière de la forêt sombre me rend fou d'écriture. Je ne trouve pas la moindre explication. Je ne suis pas très intelligent. J'ai définitivement renoncé...


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  • Dans un éclair je me dis que cette vérité avait le même goût de sueur épicée qui me faisait ravaler ma salive. En premier lieu donc et toujours sous le coup de l'excitation, je décidais de passer en ville et pourquoi pas m'arrêter prendre un verre avant d'aller rendre la voiture à Raymond. J'étais tranquillement sur le chemin et juste à un croisement et de l'autre côté d'une rue, j'aperçois David, Le Nouveau Prêtre.. Le voir me fit un effet que je ne connaissais que trop bien. J'ai bien senti que l'idée de lui serrer la main et dans la foulée discuter un bout de gras avec lui me procurerait un réel plaisir, quoique assez surprenant, et en sens inverse, une sorte de mauvaise volonté, une gêne pesante, une réticence qui s'exprimait par un pincement au coeur, un masque discret il est vrai sur mon visage mais un peu dégueulasse aussi, comme les paroles qui restaient bloquées dans ma gorge, cette nervosité malsaine encore que j‘avais toujours connu. Puis à son tour il m'aperçut et me fit un signe franc de la main, Clair et Limpide comme une Marque d'Humanité. Alors j'arrêtais mon véhicule et m'en extirpais avec bonheur pour traverser la rue et le rejoindre sur le trottoir où il m'attendait. Ca va... Ca va... On va se boire un verre, si t'as cinq minutes... Ca me va... Comment dirait-on la même chose en Italien, Russe, Polonais, ou Chinois. Tu t'y fais à ce trou, je lui demandais alors que nous venions de nous attabler à la première terrasse sur notre chemin. Très bien. Et toi ça te plaît, comment est-tu arrivé par ici... Presque par hasard, j'avais entendu quelqu'un en parler à quelqu'un d'autre à une table comme celle-ci, quand je suis arrivé dans la région et je suis venu voir. Le type disait en rigolant que pour mourir d'ennui il n'y avait pas mieux. Crois moi que c'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd.. C'est exactement ce que je cherchais, d'ailleurs aussitôt j'en ai déduis que c'était le paradis sur Terre.. et J'ai rappliqué le jour même... ça fait cinq ans de ça maintenant... Il s'esclaffa avec son beau sourire à mon histoire et secoua la tête. Puis il se mit à me décrire ses journées qui ne ressemblaient à rien de ce que je connaissais. Mon imagination peinait à le suivre dans ses Aventures au milieu Des Siens censés aussi être Les Miens. Le sont-ils forcément... J'ai un doute;. Ca t'arrives de courir, le footing je veux dire, tu aimes ça. Il me demanda en changeant soudainement de sujet. Je m'y suis remis depuis pas très longtemps; mais je crois que je vais plus décrocher. Je commençais à rouiller sérieusement, et à mon âge cela devient vite chronique.. Si on fait pas attention.. J'ai plus les moyens d'être fainéant. Il sourit à nouveau et s'amusa à rajeunir de dix ans d'un coup. Rien que pour m'épater. Comment as tu deviné pour ça aussi... Bien sûr, aussitôt je m'en voulais de m'être livré de cette façon et j‘eus le sentiment qu'en une seule phrase je venais de lui raconter toute ma vie. Alors qu'évidemment il allait me proposer de courir avec lui un jour ou l'autre, et j'aurais voulu me tromper. Seulement mes craintes ne reposaient pas sur du sable. J'avais vu juste et le vérifiais immédiatement. Et bien écoute, je Partage ça avec toi. Moi Aussi j'ai besoin de courir à peu près tous les matins, c'est une vraie drogue je dois reconnaître comme pour toux ceux qui s‘y mettent un jour. Si ça te dit, demain on peut courir ensemble. Piégé que j'étais, fait comme un rat une fois de plus, et impossible de trouver une excuse, pas le plus petit alibi en vue. Mais il dut soupçonner ma pensée. Enfin, si ça te fait plaisir, il y en a qui préfèrent courir seuls, je le comprends. Mais non pas du tout. Je m'exclamais. Ca va me changer un peu, Au Contraire.. t'as qu'à passer demain vers dix heures chez moi, je prend toujours un chemin qui part en forêt du côté de la petite vallée du Prats. Après c'est plutôt une ligne droite en altitude, cela ressemble à un couloir aérien. Je fis en appuyant l'image d'un geste curieux. On voit loin mais ça reste assez plat quand même, c'est un excellent parcours, sauf quand il pleut, ça devient de la boue à cause des troupeaux de moutons. Je me crus obligé d'en rajouter pour faire taire ses soupçons...


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  • J'avais fini par descendre mon radiateur et malgré la contrariété je ne pouvais m'empêcher de repasser la première séquence du film durant laquelle la magnifique paire de fesses de mon inconnue s'était agitée sans vergogne devant mes yeux. Nom d'un chien je me disais en constatant à quel point rien de tel ne m'était arrivé depuis des années. Je ne parle même pas d'une histoire faite de chair et de réalité, un truc normal pourtant si on tient compte du fait qu'il y a certainement sur terre autant de femmes que d'hommes dans le besoin, mais d'une pensée aussi violemment érotique, une de ces séquences qui branche directement le deux cent vingt volts là où ça fait mal. Je ressentais pour la première fois depuis longtemps l'envie vraie de voir passer mon mal de crâne, et dans la foulée de me débarrasser du sac de pierres qui me brisait le dos. Puis de colère là j'aurais assommé un lion d'un seul coup de poing. Dans un pareil état d'esprit je fus à peine surpris quand j'aperçus mon inconnue accoudée à la portière de sa fameuse camionnette au bord de la route, juste après la sortie de la casse. Quelque chose me serra la gorge mais je ne doutais pas une seconde qu'elle m'attendait, Moi.., quoique je fus immédiatement traversé par la crainte de tout gâcher. Une crainte justifiée et due à un cruel manque d'entraînement en la matière. Comme le démontrait le précédent épisode avec Danielle qui se termina dans une flaque de honte. Heureusement elle me sourit d'une certaine façon qui comme par miracle enleva sur mon passage les dernières épines. Mieux même, je m'arrêtais à sa hauteur et sortant la tête de la portière je me permis de lui demander si par hasard elle ne venait pas de tomber en panne juste à cet endroit. Ca se pourrait bien. Elle grogna d‘une voix qu‘elle s'évertuait à rendre vulgaire. Seulement même sans ça elle ne m'aurait pas paru tellement commode. Mais j'ai un petit marché à vous proposer, si ça vous dit de l'entendre. Eh bien. Je fis pour ponctuer sa phrase, puis. Allez-y toujours, je crois que ça peut m'intéresser. Tout en parlant je laissais mon regard glisser sur ses hanches. Elle tourna son visage vers le ciel, où des nuages longs et blancs dessinaient des paysages d'îles lointaines. Une Belle Femme Mûre d'à peu Près Ma Génération... Je me suis dit que vous avez l'air de vous y connaitre en mécanique, ça c'est sûr, et que pour ma part j'ai besoin d'un coup de main. Il ne va pas se mettre en place tout seul mon cardan, et pas question en ce moment de payer un mécano, ces gens là ils ne font pas de cadeau. Pire encore quand ils voient venir une femme seule. C'est connu, non.. Me décochant un solide clin d'œil. Mon Dieu. Je fis intérieurement. Pourquoi ne pas s'entendre. Elle siffla. Je comprend parfaitement votre problème. Je continuai dans le même souffle. Alors voilà, si ça vous tente, vous venez chez moi pour le changer ce cardan de la petite camionnette que vous avez juste devant les yeux. Regardez comme elle est gentille. Elle fit en tapotant la caisse. Elle a jamais mangé personne, je peux vous l'affirmer. Elle claque seulement des cuisses en ce moment quand on la démarre, que ça me fait de la peine.. J'ai tout ce qu'il faut à la ferme au point de vue matériel, et.. Elle laissa la phrase en suspens dans l'air tiède, puis reprit. Et je vous offre une soirée entière où je serais toute à votre disposition, un bon petit repas, c'est moi qui invite, du bon vin, et vous verrez pour la suite, vous ne risquez pas de repartir déçu. Je me connais assez pour vous le dire. Je manquais évidemment de m'étrangler mais rapidement je doutais d'avoir bien compris ce qu'elle me disait, c'est pourquoi je n'hésitais pas à exiger quelques précisions. Euuh, redites moi ça d'une manière plus facile à comprendre, j'ai l'impression d'avoir mal entendu. C'est sans doute que je deviens sourd avec l'âge. Je lui dis en me secouant. Elle ne fit pas semblant de rire, ce qui aurait été la règle notamment dans un récit romanesque du genre roman réaliste, particulièrement ceux que l'on adapte volontiers à l'écran, avec des types en débardeur et qui ont de vrais gueules. Alors que je ne ressemblai qu'à une sorte de vieux singe de nulle part.. J'ai bien dit tout ce que vous pensez avoir entendu, C'est Pas la Peine de Faire l'Idiot.. voilà, dites oui ou non, on ne va pas y passer des heures. Je n'attendis pas longtemps, me disant que j'étais prévenu et qu'il ne fallait pas se mettre à louvoyer au point de faire pitié dans une scène pareille. Il était temps pour moi de montrer qui j‘étais. Enfin.. Ca marche. je lançai, et pour faire aussi bien que je pouvais je tendais le bras et lui tapai dans la paume de la main. Elle me sourit enfin et oublia sa grimace. Après quoi on se mit d'accord pour le lendemain après-midi. Je repris ma route et entre-temps elle m'avait balancé son adresse et numéro de téléphone écrits sur une page arraché dans un carnet. Je dépliais la feuille qui venait d'atterrir sur mes genoux sans lâcher le volant. Elle y avait même dessiné un petit plan pour que je ne puisse pas me tromper. La première chose qui me vint à l'esprit tout en changeant les vitesses dans une série de virages, et la caisse ondulait comme une vieille baleine, était qu'il m'aura fallu atteindre un âge presque canonique pour vivre enfin une vraie scène de genre, sortie tout droit d'un bouquin écrit à la première personne avec une couverture bleue, des silhouettes fragiles, et une courte robe rouge près d'une carcasse de voiture américaine. Je me dis aussi qu'elle en pensait peut-être autant, qu'elle venait de se coller une cigarette blonde entre les lèvres et qu'elle suçait une bonne bière en s'épongeant une goutte de sueur qui perlait sur son front. Qu'elle faisait ça pour la Première Fois de sa Vie et que Ca Venait de me Tomber Dessus;. Je savais enfin qu'il suffisait d'être deux pour écrire une bonne histoire. Seul.. et que ça me Plaise ou non, on s'étouffe de Silence et on Perd l'Inspiration. Mon Dieu, je venais de traverser la vie comme un imbécile, et je m'étais royalement ennuyé, emmerdé comme un rat si je me laisse aller à quelque triviale formule, et je venais de lire tout ça sur un coin de soleil. Une vraie illumination...


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    Je me rendis avec la voiture de Raymond jusqu'à une casse située à quinze kilomètres. Je lui avais trouvé un teint cireux le matin, figé par une fine couche de paraffine. N'empêche qu'il souriait en me voyant venir. T'as retrouvé le chemin. Il me fit. Je profitais de l'occasion pour lui proposer une partie de pèche. Dans deux semaines, dès que je serais sorti de l'hosto. Comment ça, l'hosto, qu'est ce qui va se passer... Ils vont essayer de me pomper tout un paquet de saloperies, avec une nouvelle machine, un truc américain il paraît. Sa vieille qui se tenait à un mètre commença à se frotter les yeux. Tu vois. Fit Raymond en s'emportant et élevant inutilement la voix. J'ai fait la connerie de tout lui dire, et ça n'arrête plus, maintenant elle me met au régime, et ça chiale, et ça pleure, et ça chiale.. Avant de s'attendrir comme un vieux chien galeux.. Viens ici ma poulette, tu te souviens quand on faisait la brouette japonaise dans les champs de blé, j'avais même pas le temps d'enlever mon barda quand je rentrais de permission, on dirait pas la Monique, mais c'était une coquine dans sa jeunesse, si tu l'avais connu, elle avait des cuisses d'actrice de cinéma. Raymond s'approcha d'elle et la prit dans ses bras. Tu vas pas nous faire chier comme ces connards de curés maintenant.; Je ne pensais pas que l'évocation de ces souvenirs était de nature à l'apaiser, tout ça sentait un peu le moisi et me mettait mal à l'aise. Mais j'étais avec des gens simples qu'il fallait prendre comme ils sont et c'est ce que je faisais. Si c'était sa façon à lui de braver le monstre qui l'étouffait, il n'y avait rien à redire. C'était parfait et je n'avais qu'à m'en prendre à ce maudit destin qui ne fait pas de cadeaux. Même pas la grâce de mourir en paix dans son sommeil, comme par inadvertance. Voilà encore un sujet sérieux je pensais, auquel j'allais m'attaquer. La vraie injustice se trouve certainement plus là dedans que dans la vie elle même, cet éclair incompréhensible, cette joie trop éphémère, ce feu follet.. Direction la casse où je devais récupérer le radiateur devant me permettre de retrouver l'immense plaisir de foncer à ma guise d'un point à l'autre sur les routes. J'éprouvais une sainte horreur pour ces opérations mécaniques, quelque chose de viscéral et inexplicable, le parfum des huiles de vidanges et de vieilles batteries se mélangeant aux tissus en décomposition me soulevait le coeur déjà d'avance. Mais comment faire autrement quand on a goûté à la mollesse de la vie moderne. Appuyer sur une pédale et sentir son lard se transporter sans effort et à pleine vitesse a de quoi rendre givré. Qui a jamais pensé à répudier cette petite partie du cerveau qui fait de nous des intoxiqués de tout ce qui est bon, sucré, et facile. Je pourrai me mettre au vélo, ou continuer à me servir du ridicule cyclo ramassé dans la grange et que j'ai bricolé pour remettre en marche. Celui-là il me sert de temps en temps quand je peux pas faire autrement. Seulement il coince dans les côtes de montagne. Mais bon, pourquoi disserter dans le vide puisque je suis là pour démonter un radiateur. Je passe à la caisse et on m'indique l'épave à dépecer. Je me dirige lentement au milieu de carcasses qu'il me faut escalader, de bouts d'ailes aussi coupants que des rasoirs, et de montagnes de pneus desquels s'écoule un liquide jaune et nauséabond. Me voici enfin devant la bête. Je me penche sous le capot pour voir, et à la vue de la rouille qui couvre les boulons je devine parfaitement ce qui m'attend. Nom d'un chien je grogne entre mes dents avant de m'enfoncer une casquette sur la tête et m'empare d'une bouteille d'eau encore fraîche que je vide à moitié. J'ai beau repousser l'idée qui me traverse l'esprit, mais je ne peux m'empêcher de penser que le garagiste ferait ça beaucoup mieux que moi, et c'est son travail ce brave homme, il exécuterait la tâche avec calme et plaisir. Sans rechigner, en sifflant même. Tout ceci j'en conviens n'a pas beaucoup de sens. Je me retrouve sous ce cagnard à maudire l'existence alors qu'un type ne demande pas mieux que de prendre ma place. Au loin j'aperçois une belle et verte forêt qui me fait de l'œil. Le soleil au-dessus de ma tête lui c'est plutôt des flèches empoisonnées qu'il me lance. Et déjà j'ai les mains pourries par la graisse et plus ou moins je me suis coupé le bout d'un doigt. Néanmoins et avec un certain courage je m'acharne et vide la bouteille d'eau tout en venant à bout des boulons bien grippés. L'un après l'autre, comme s‘il s‘agissait d‘une épreuve incontournable à l'issue de laquelle je me verrai attribuer une note qui sera gravé sur mon front. Je commençai à être content de moi au fur et à mesure que je parvenais à déboulonner toutes mes pièces. J'étais couché sous la voiture et m'acharnais sur un ultime collier de durite, il résistait l'enfoiré, et que je finis par découper au burin, quand j'entendis une voix de femme qui jurait un peu plus loin et s'égosillait. Ce qui me frappa tout de suite fût d'entendre quelqu'un râler à peu près comme je fais quand je suis bien énervé. Forcément ça éveille la curiosité et je me levais pour aller voir tout en m'épongeant le front. Je n'aperçus que son derrière, vu qu'elle était à quatre pattes et avait la tête plongé sous le passage de roue d'une camionnette. Un beau derrière, très légèrement enveloppé mais loin d‘être raté. On devinait sans effort la peau tendue sous la toile du pantalon qui épousait parfaitement ses fesses bien distinctes l‘une de l‘autre. Oouhh. J'en restais bouche bée et complètement incrédule. Je manquais de me frotter les yeux de mes doigts crasseux et me ravisais à temps en me passant l'avant-bras sur le front. Je me serais agenouillé contre elle juste pour me frotter et lui serrer ma queue contre sa belle vulve que chacun pouvait deviner. Par surprise et sans lui demander son avis. Je sentis en une fraction de seconde à quel point la civilisation est une chose fragile et précieuse. Heureusement pour tout le monde je reste un être doux, bien élevé, et la solitude n'a rien a voir là dedans. Je fis encore un pas sans qu'elle ne se rende compte de rien. Je l'entendais jurer et ahaner, grogner et incendier le ciel pour son infortune. Bien entendu je fus pris de compassion pour la malheureuse et je lui demandais si tout allait bien. Parce qu'il faut bien commencer par une chose ou une autre. Elle s'immobilisa, puis  lentement fit mine de se retourner mais sans le faire. Je m'amuse.. Elle siffla rudement et s'empara d'un marteau posé au sol pour se mettre à taper sur une pièce derrière le disque de freins. Elle n'avait pas daigné me regarder. Je compris rapidement aussi que la mécanique n'était pas sa spécialité. Je déteste l'exercice mais curieusement je ne m'en sors pas si mal quand je finis par m'y mettre. Pour ce qui la concernait c'était visiblement tout le contraire. Beaucoup de bonne volonté avec très peu de résultats. Voilà ce que je pouvais dire en observant son derrière qui vibrait littéralement sous l'effet des coups de marteau. La bienséance aurait voulu que je m'en retourne à ma place après l'échec de ce premier contact. Forcément comme je suis, je restais cloué sur place à fixer ce Beau Cul qui à chaque coup de marteau tressautait et S'ouvrait Comme une Fleur. Comme s'il possédait une vie libre et autonome, se moquant totalement des ennuis de sa propriétaire. Elle se retourna finalement et m'envoya un cinglant: Je vous permet vous.. En apercevant mon ombre qui la couvrait presque entièrement. Laissez-moi faire plutôt. Je répondis et déjà je mettais un genou à terre. Elle n'hésita pas une seconde et sortit de son trou en me collant le marteau dans la main. La garce, maintenant que je voyais son visage en entier cerné de cheveux blonds et frisés, ses lèvres pleines qui lui faisaient une moue un rien vacharde, j'étais coincé. Définitivement. Même plus le temps de changer d'avis. Je pris sa place et un peu au marteau et un peu au tournevis, je commençai à voir sortir le cardan qui devait faire son bonheur. Je transpirais à grosses gouttes, je me vidais par tous mes pores, et je ne comprenais même pas ce qui m'avait pris. Bien entendu j'essayais de faire le malin pour donner le change. Je sais pas si c'est un travail de femme la mécanique. Je lui fais. Vous avez tout à fait raison. C'est ce que je me disais aussi. Elle répondit. Puis après un silence assez vexant. Surtout qu'on meurt de chaud et de soif dans ce bordel. Elle voulut bien lâcher encore comme un os à un chien. Après quoi elle se tut pour de bon. J'essayais de relancer la conversation tout en m'échinant sur le cardan qui enfin se laissait faire. Mais c'était peine perdue. Elle semblait n'avoir plus rien à me dire. Je commençais à me maudire comme d'habitude quand je réalise une nouvelle fois que j'ai pas loupé la dernière connerie. Je n'avais pas encore fini mon travail et je perdais mon temps en dessous d'une camionnette qui ne m'avait rien demandé. C'est dans ces moments là que je me mets à ruminer sur mon passé pas glorieux et les souvenirs en trop que j'ai accumulé au fil des années. Toujours sans réfléchir. Si par un coup de baguette magique je pouvais effacer de ma mémoire les millions de minuscules erreurs Qui la Travaillent.. et récupérer encore par miracle toute l'énergie qu'elles m'ont coûté jour après jour, je serais bon pour recommencer une nouvelle vie. Avec le Compteur à Zéro.. Et peut-être même du bonus.. Une vision aussi réaliste calma rapidement mon imagination et au bout d'une demi-heure je tenais le cardan entre mes doigts qui étaient noirs de graisse. Je le posais sur le sol, et elle ne prit même pas la peine de m'octroyer un sourire engageant. Elle se contenta de ramasser Mon Présent et déguerpit. J'étais vraiment le roi des cons je pensais. Je finissais à peine par oublier cette affaire quand une heure plus tard je quittais la casse...


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